Top 5 – Littérature afro-caribéenne

L’espace virtuel est un espace culturel. Et comme tout espace culturel, il est le théâtre de cultures en concurrence. La colonisation de l’espace virtuel s’opère par la présence massive de médias, bases de données et sites internet qui reproduisent les inégalités et discriminations présentes dans le monde réel. Ce n’est donc pas surprenant que les cultures « minoritaires » se retrouvent reléguées au second rang dans les moteurs de recherches. Une simple recherche sur les grands prix littéraire laisse constater que l’Afrique n’est pas invitée aux grands rendez-vous du 6e art. Effacée de l’Histoire moderne, c’est au moment des décolonisations que les premiers romans écrits apparaissent. La langue française (ou anglaise) s’impose dès lors comme patrimoine culturel. C’est par cette indélébile référence au colonisateur que participent dorénavant nos plus grands esprits au monde des idées. La colonisation modifie donc en profondeur la manière de dire l’Histoire en Afrique de l’Ouest puisqu’il scelle le passage de la narration orale à l’expression écrite en langue coloniale .

L’Afrique regorge d’écrivains. Certains dont la popularité n’est plus a démontrer tels Léopold Sédar Senghor, Amadou Hampathé Bâ, Chinua Achebe, Mariama Bâ et bien plus. Cet article s’inscrit dans une longue série de propositions de lectures.

Petit détour réflexif pour noter l’importance de s’accaparer l’espace virtuel et d’y diffuser largement le savoir du continent. Voici les top 5 de ma revue littéraire 2015.

L’ordre dans lequel sont proposés les oeuvres évoque une évolution géographique. Si les deux premiers se passent respectivement avant et après l’indépendance en Côte d’Ivoire, ils représentent le “classique africain” de l’époque, très emprunt des réalités, du bagage colonial et de la mutation des sociétés de traditionnelles à modernes. Americanah opère le passage à la littérature contemporaine forte de la culture éclatée, portée par les « afropolitains ». Faisant la transition entre l’ici et l’ailleurs, L’Afrique et l’Amérique. Les deux derniers romans, Amour, colère et folie et Un billet d’avion pour l’Afrique évoquent le récit de l’autre côté de l’Océan, des Amériques où l’Histoire des noirs propose d’autres perspectives et problématiques.

1. Climbié de Bernard Dadié est le numéro 1 de la liste pour avoir été le premier roman ivoirien paru en 1956, quatre ans avant la déclaration d’indépendance. C’est donc un roman très emprunt de réalisme et de vécu. Traversant les identités diverses du pays et de la région, ce roman autobiographique dénonce les violences du colonialisme et son impact sur les cultures. Dans un pays en pleine mutation, dans une culture en plein mutilation par la colonisation encore en cours, l’oeuvre constitue en elle-même une résistance à l’aliénation qui y est dénoncée.

2. Les frasques d’Ébinto de Amadou Koné. C’est a seulement 18 ans, en 1970 que l’auteur écrit ce roman. La maitrise du verbe, le lyrisme et l’intrigue font de cet oeuvre un essentiel de la littérature ivoirienne qui obtient le prix du meilleur roman africain en 1985. Le jeune Ébinto intelligent et débrouillard, généreux et aimant, contraint au décrochage scolaire en raison de la grossesse de sa petite-ami s’aigrit au fur et a mesure de ses échecs. Monique, l’épouse d’Ébinto personnifie le sort de ces jeunes filles victimes des sociétés patriarcales. C’est donc à travers un roman doux et violent à la fois que l’écrivain dénonce la condition des femmes, la pauvreté et les difficiles conditions de vie tout en effleurant les questions d’exode rural et l’occidentalisation des grandes villes.

3. Americanah de Chimamanda Ngozi Adichie. Écrivaine nigériane, elle est souvent décrite comme le nouveau visage de la littérature africaine. A mi chemin entre l’autobiographie et la fiction, c’est un roman qui fait la parfaite synthèse entre l’humour et le drame. Histoire d’une traversée, le roman dépeint parfaitement l’aventure de l’émigration/l’immigration d’une jeune femme éduquée sur le sol américain. Les expériences les plus anecdotiques aux constations les plus violentes sont décrites avec habileté. “I became black in America” est une citation du roman qui exprime le bagage culturel, politique et social qui se greffe à la peau noire dans les sociétés occidentale et précisément aux États-Unis. Ce roman montre les différentes couleurs de l’immigration et résume avec brio l’identité complexe et intéressante des jeunes nomades africains.

4. Amour, colère, folie est roman écrit par Marie-Vieux Chauvet en 1960. Une oeuvre en trois volets déconcertante de vérité et de drame. L’oeuvre en elle même est une tragédie tant elle jongle si bien avec les  traumatismes d’une société habitée par la terreur d’un dictateur et des hommes en noirs, l’oppression de la colonisation et les complexes de “races”. La dictature des Duvalier s’y trouve décortiquée dans un quotidien où l’amour est dépeint sous fond de colère et de folie. La trilogie est une oeuvre de révolte qui a coûté chère à l’écrivaine contrainte à l’exil.

5. Un billet d’avion pour l’Afrique du titre original All God’s children need travelling shoes de Maya Angelou. Ce roman écrit en 1964 décrit l’expérience de “retour” d’une Africaine-Américaine vers le continent. C’est au Ghana de Kwame Nkrumah, réputé pour sa lutte émancipatrice que nombre d’afro-américain trouvent refuge. Refuge dans la mesure où le retour vers les origines s’avère souvent rempli de désillusion pour un peuple en mal de ses racines. Le retour vers la terre des ancêtres devenue terre promise atteint son paroxysme dans les années 1960. Maya Angelou décrit avec humour et réalisme l’expérience passionnée de la jeune femme qu’elle était dans un Ghana jeune et révolutionnaire où elle fait la rencontre de Malcolm X et Kwame Nkrumah.

Bonne lectures

Aïssatou Dosso

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