Le roi du Maroc a entamé depuis mardi dernier une tournée en Afrique subsaharienne avec comme destination le Mali, la Côte d’ivoire, la Guinée et le Gabon. Débutant sa visite par un séjour de 5 jours à Bamako, où il a été reçu par le Président Ibrahim Boubacar Keïta, les dirigeants ont pu aborder les questions économiques, sociales et sécuritaires du pays hôte.
Sur la crise malienne, le Maroc s’engage comme facilitateur en vue d’un retour de la paix dans le pays. Le souverain cherifien avait déjà reçu fin janvier, à la demande du Président Keïta, les responsables du MNLA afin d’aboutir à un apaisement et à une négociation entre les protagonistes. AQMI (al Quaïda dans le Maghreb islamique) est une menace constante pour les pays maghrébins et sahéliens. Avec la chute de Khaddafi, les groupes armés ont gagnés du terrain. Le Sahel est une zone géographique aux frontières poreuses laissé a son auto-régulation, oublié des administrations étatiques. La question sécuritaire du Nord-Mali est donc une problématique qui nécessite l’action concertée à la fois du Mali mais également des autorités algériennes, libyennes, marocaine, mauritanienne et nigérienne. Le Royaume marocain est donc un acteur important dans la résolution de la crise au Sahel.
Au delà des questions proprement malienne, la visite du Roi Mohammed VI s’inscrit dans une dynamique partenariat panafricain. Cette tendance s’explique pour plusieurs raisons.
La crise de leadership en Afrique:
le Maroc a une opportunité de se positionner aujourd’hui en tant que leader d’une solidarité trans-africaine. En effet, les différents mouvements nationalistes africains ont été propulsés par des têtes fortes dont Nasser, Bourguiba, Hassan II, Houphouet-Boigny, Khadhafi. Dans cette lignée, malgré le retrait du Maroc de l’UA, le Roi multiplie les liens entre son pays et le reste de l’Afrique. La dernière visite du Roi marocain au Mali ne date que de six mois lors de l’invesstiure du Président IBK. Il y a un an quasiment jour pour jour, il effectuait une même visite d’État dans l’Ouest africain.
La promotion d’un partenariat gagnant-gagnant
La dimension économique et stratégique des visites royales s’observe par l’accroissement des accords bilatéraux. Le secteur privé et public marocain trouve des débouchés dans les domaines financiers, agricoles et tertiaire. À Abidjan depuis hier, lundi 24 février, le Roi dirige le forum économique ivoiro-marocain (premier forum de ce genre en dehors du royaume). Cet événement témoigne de la volonté du Maroc de figurer à la tête des pays investisseurs en Côte d’Ivoire. En effet, Au début de l’année 2013 la Côte d’Ivoire a accueilli 30% des investissements directs à l’étranger du Maroc, soit plus de 1,5 milliards de dollars. Par ailleurs, on peut noter l’arrivée des banques telles que. Attijariwafa Bank détiennent 51% de la SIB (société ivoirienne de Banque). Le Groupe Anas Sefrioui (Addoha) s’est installer dans le domaine de l’immobilier en participant à la construction de 2600 logements sociaux.
Au totale 17 conventions avec le Mali et 18 conventions de coopération ivoiro-marocaine sont prévues, couvrant les domaines de l’agro-industrie, de l’immobilier, de l’industrie et l’énergie.
L’harmonisation de l’éducation islamique et les formations professionnelles
L’implication croissante du Maroc dans les sociétés subsaharienne s’apprécie également dans le secteur de l’éducation et de la formation. En accordant des bourses d’études dans les centres de formation d’imams régit par le Royaume, Mohammed entend endiguer le problème de l’extrémisme religieux qui sévit actuellement en Afrique francophone.
D’autre part, Grâce a une stratégie offensive avec l’adoption d’accords multilatéraux entre le Maroc et plusieurs pays africains (Sénégal, Congo, Gabon, Guinée, Niger, Kenya, Côte d’Ivoire, Mali), il s’impose comme une destination prisée des étudiants. Avec l’un des systèmes éducatif les plus performant de la région, le Royaume offre une alternative, entre autre aux tracasseries liées à l’obtention des visas »occidentaux ». En 1994 le nombre d’étudiant d’Afrique fréquentant les établissements publics et privés marocain était de 1040 alors qu’il s’élèvait à 15 000 en 2011.
La question de sa ré-intégration à l’Union africaine?
Malgré les liens multiples et amicaux que le Maroc entretient avec ses voisins africains et sa position de fondateur de l’Union, le royaume n’a toujours pas réintégré l’organisation. L’année 1984 marque le début de la discorde entre le Maroc et l’OUA qui admet la République arabe saharaouie démocratique (RASD) en son sein.
«Depuis son départ de l’OUA, le Maroc a paradoxalement renforcé ses liens avec le continent africain en privilégiant le partenariat économique et l’union économique» Le Matin du Sahara. Cette citation est très édifiante au sujet des choix pour lesquels le Royaume a opté. Son refus de ré-intégrer l’union pourrait donc s’apparenter à un désaccord avec l’identité culturelle de l’Union dans sa forme actuelle. L’Union africaine traverserait-elle une crise identitaire? Lors de sa création au lendemain des independances (le 25 mai 1963), l’Organisation de l’unité africaine s’inscrivait dans une vague souverainiste où la défense des frontières et l’autodétermination des peuples étaient le leitmotiv. Les enjeux et valeurs d’alors ont été cristalisés dans la charte africaine sous le principe de l’intangibilité des frontières par exemple. Il serait peut-être temps de remettre à jour les fondements de l’Union afin de se doter des instruments appropriés pour les défis actuels.
Aïssatou Dosso